Droits de réplique, polémiques et débats

De Jeune-Europe au PCN : histoire du
Communautarisme européen


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PCN : l'héritage
de THIRIART


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Courrier

DE "JEUNE-EUROPE" AU PCN : HISTOIRE POLITIQUE DU COURANT

COMMUNAUTARISTE

EUROPEEN EN FRANCE (1961-2001)

- 1961 : LA NAISSANCE DU COMMUNAUTARISME NATIONAL-EUROPEEN

- LA CRISE ALGERIENNE : UN TREMPLIN POUR LA REVOLUTION EUROPEENNE

- 1962 : LA STRUCTURATION DES RESEAUX FRANÇAIS DE "JEUNE-EUROPE"

- L'UTILISATION REVOLUTIONNAIRE DE L'AVENTURE DE L'O.A.S. PAR "JEUNE-EUROPE"

- "JEUNE-EUROPE" APRES L'ECHEC DE L'OAS

- "JEUNE EUROPE" CONTRE L'EXTRÊME-DROITE

- UN NOUVEAU DEPART EN 1964 :

- LE C.E.P.S.E. ET "LA NATION EUROPEENNE"

- 1965 : LE LANCEMENT DU "PARTI COMMUNAUTAIRE EUROPEEN" (P.C.E.)

- 1969-1971 : LE TEMPS DES GROUPUSCULES ET DES REVUES EPHEMERES

- L'ORGANISATION LUTTE DU PEUPLE (OLP)

- LE "CENTRE D'INITIATIVE PROGRESSISTE EUROPEEN" (C.I.PR.E.)

- LA NAISSANCE EN 1984 DE LA SECONDE GENERATION COMMUNAUTARISTE : LE P.C.N.

- L'ACTION DE LA REVUE "CONSCIENCE EUROPEENNE" (1982-1987)

"LE PARTISAN EUROPEEN" (1986-89)

- LES CLUBS ET LA REVUE "NATIONALISME ET REPUBLIQUE"

- L'INFLUENCE DU COMMUNAUTARISME SUR LA "NOUVELLE DROITE"

- L'IMPACT DES THESES COMMUNAUTARISTES AU SEIN DE LA MOUVANCE NATIONALE-REVOLUTIONNAIRE FRANCAISE

- 1993 : L'IMPLANTATION DU P.C.N. FRANCE

- 1996 : "NOUVELLE RESISTANCE" FUSIONNE AVEC LE PCN

- 1996 : LE PCN PREND LA DIRECTION IDEOLOGIQUE DU "FRONT EUROPEEN DE LIBERATION"

- LE PCN : LA SEULE ALTERNATIVE POUR LES MILITANTS NR ET NATIONAUX-BOLCHEVIQUES DE FRANCE

Malgré plusieurs études sur le COMMUNAUTARISME NATIONAL-EUROPEEN dans son ensemble en Europe, l'histoire politique de notre courant en France, de ses nombreux avatars et résurgences, de son influence et de sa structuration, restait à écrire. Il est utile aujourd'hui de procéder à cette étude et à cette analyse historique, au moment où le Communautarisme européen agit de nouveau de façon structurée en France, mais aussi où certains, profitant du manque d'informations d'ensemble sur le sujet, se servent de l'héritage communautariste et de la figure de son fondateur Jean THIRIART pour les détourner de leur but et défendre des positions que le père du Communautarisme combattait sans concessions.

1961 : LA NAISSANCE DU

COMMUNAUTARISME NATIONAL-EUROPEEN

Comme partout en Europe, le Communautarisme européen est issu en France du mouvement créé par Jean THIRIART en Belgique fin 1961 : l'organisation européenne "JEUNE-EUROPE".

Dès sa naissance, le courant communautariste va être intimement lié au mouvement nationaliste-révolutionnaire français. En effet, a l'opposé de la plupart de ceux qui luttent contre la perte d'influence de l'Europe dans le monde et contre le bradage des empires coloniaux au profit de Washington, Jean THIRIART, qui raisonne en termes de géopolitique et de géoéconomie, lie l'entièreté du processus de décolonisation et en fait une analyse globale, dénonçant les influences onusienne et américaine qui sapent la puissance de l'Europe dans le monde.

Dès les débuts du mouvement, en juillet 1960, Jean THIRIART associe le combat des Belges qui refusent la perte de l'empire du Congo au combat de ceux qui, en France, luttent pour le maintien de l'Algérie dans la sphère européenne. "France et Belgique, hier unis dans la victoire, aujourd'hui dans les épreuves. Algérie, Congo, deux guerres menées par les mêmes ennemis, par les ennemis de l'Europe", écrit THIRIART dans son hebdomadaire "BELGIQUE-AFRIQUE" dès septembre 1960.

Quelques semaines plus tard, l'hebdomadaire se transforme en "EUROPE-AFRIQUE", explicitement sous-titré "Pour la communauté de Narvik au Cap". Dans sa chronique hebdomadaire intitulée "Chronique de la Nation européenne", THIRIART précise que "L'Europe de Narvik au Cap n'est pas une vue de l'esprit ni un slogan lancé à la légère, il s'agit d'une nécessité politique commandée par la géographie... L'Europe ne peut accepter d'avoir dans son dos une Afrique livrée à l'anarchie politique, une Afrique agitée par les surenchères des USA et de l'URSS. En Afrique, l'ONU joue le jeu des USA presque ouvertement"(1).

A la différence des partisans français de l'Algérie, il place évidemment ce combat dans une problématique grand-européenne, impériale, et vise à l'intégration géopolitique du monde arabe dans la sphère d'influence européenne, ce qui exclut chez lui tout racisme et toute politique coloniale ou néo-coloniale. Il précise donc que "L'Europe ne peut continuer éternellement cette lutte avec le monde arabe. L'Empire romain a bien digéré des Espagnols, des Gaulois, des Germains. Pourquoi ne pourrions-nous intégrer les Arabes ! Aux Arabes, il faudra proposer une association vraie, honnête, de qualité. "(2).

LA CRISE ALGERIENNE : UN TREMPLIN POUR LA REVOLUTION EUROPEENNE

La dimension géopolitique, le maintien des empires européens, comme cela a échappé à la plupart des observateurs politiques (il n'y a aucune nostalgie coloniale chez l'anti-impérialiste Thiriart), ne sont pas le seul but, ni même le but principal de THIRIART dès cette époque. Celui-ci, qui vise à organiser une organisation révolutionnaire dans toute l'Europe, et à trouver un terrain pour que celle-ci puisse prétendre au pouvoir, voit dans l'Algérie le tremplin de la Révolution européenne. THIRIART est en effet conscient que dans aucun pays européen pris isolément, et singulièrement en Belgique à cette époque, un mouvement ne pourra prétendre disposer de la dimension nécessaire pour libérer l'Europe.

Dès septembre 1960, il précise ses objectifs dans un article intitulé "Alger, départ de l'Europe", "La technique révolutionnaire, dixit LENINE, TROTSKY et compagnie, conseille de choisir une plate-forme de départ sur un terrain particulièrement favorable. Jetons un bref coup d’œil sur l'Europe. Où trouver ce terrain favorable ? L'Allemagne digère béatement sa renaissance économique. L'Italie est encore marquée, hélas ! , par sa défaite de 1945. L'Espagne trop isolée et trop pauvre. Reste la France. La France où, par tradition séculaire, les idées nouvelles jaillissent facilement. La France qui appartient aux vainqueurs de 1945. La France qui n'a cessé d'être en guerre depuis quinze ans. La France traversée par les passions, durcie par les épreuves, entraînée par les guerres qu'elle doit mener, présente les conditions pour " un grand changement" ou pour un "grand départ". Ce sera en France qu'il faudra commencer la Révolution européenne. Révolution des idées, des institutions, des hommes. Du fait de la guerre d'Algérie, la France est en état de sensibilité politique exacerbée, la France est survoltée. La société française est en état de crise. C'est un Etat dangereux, mais c'est aussi un Etat fécond de promesses politiques... Ce n'est pas seulement le sort de la France, en tant que nation, c'est aussi le sort de l'Europe en Afrique du Nord. La France combat pour l'Europe. L'attention de tous les Européens vigilants se portera donc vers la France. Tous leurs efforts également. Leur TERRAIN, choisi par l'Histoire pour y faire naître la Nation européenne, est celui de la Vième République"(3).

Dès les débuts du mouvement, ses publications, largement diffusées en France, reprennent interventions et communiqués des partisans de l'Algérie française. La réaction du pouvoir gaulliste ne se fera d'ailleurs pas attendre. Le "JOURNAL OFFICIEL" de la République française du 31 janvier 1961 publie un arrêté d'interdiction d'une publication étrangère prise par le Ministre de l'intérieur, sur proposition du Directeur-général de la Sûreté Nationale, qui "interdit sur l'ensemble du territoire de la république, la circulation, la distribution ou la mise en vente de "BELGIQUE-AFRIQUE (EUROPE-AFRIQUE)". L'interdiction sera tournée par différents moyens, notamment la publication de l'hebdomadaire sous le titre "NATION EUROPE", celui-ci continuant à soutenir les partisans de l'Algérie française, notamment lors du putsch d'Alger de 1961.

1962 : LA STRUCTURATION DES RESEAUX FRANÇAIS DE "JEUNE-EUROPE"

Après l'échec militaire du putsch d'Alger, l'organisation de THIRIART, devenue "JEUNE EUROPE" fin 1961 et présente dans de nombreux pays, s'oriente vers un soutien important aux derniers partisans de l'Algérie française regroupés dans l'OAS, l'"Organisation de l'Armée Secrète". "NATION EUROPE" publie les communiqués de l'OAS et "JEUNE EUROPE" sert de base arrière aux membres de l'OAS qui luttent directement sur le territoire métropolitain.

Dans le même hebdomadaire, le 13 octobre 1961, est annoncé la naissance de la "section France de JEUNE EUROPE". La perspective de THIRIART à cette époque est de préparer une situation révolutionnaire en France. Dans un message aux réseaux France de l'organisation, THIRIART précise ses objectifs, le 2 novembre 1961 : "Le rôle politique actuel de JEUNE EUROPE dans ses "réseaux France" est le durcissement de tous les groupes favorables à l'Algérie française. Le rôle politique actuel des SOUSTELLE et BIDAULT est d'offrir une façade de respectabilité petite-bourgeoise, de bon républicanisme, d'authentique démocratisme. Infiltrez-vous dans toutes les organisations favorables à la cause de l'Algérie française, si modérées soient-elles. Intoxiquez leurs membres, leurs militants afin que ceux-ci entraînent leurs "chefs" à faire beaucoup plus qu'ils n'avaient l'intention de faire ! Faites en sorte que les membres de ces organisations "molles" et "hésitantes" portent contre leurs chefs des accusations de mollesse, d'hésitation... La mission des groupes JEUNE EUROPE se divisera en deux activités. L'une d'infiltration dans les groupes favorables et modérés pour les durcir, l'autre d'actions dures spécifiquement JEUNE EUROPE." THIRIART y rappelle aussi la dimension européenne du combat mené : "La cause de l'Algérie française et la cause de l'Europe sont communes. C'est pourquoi nos camarades français peuvent compter sur l'appui total de toutes nos organisations, allemande, flamande, autrichienne, italienne, espagnole. Le caractère européen de notre organisation fait qu'il ne subira jamais la décapitation de tant de mouvements nationaux, "strictement français". Nous sommes partout, la tête peut repousser partout, à Cologne comme à Londres, à Barcelone comme à Milan. Notre appareil est de ce fait dix fois plus efficace que tous les mouvements cantonnés dans un seul pays. Vous pouvez compter sur nos militants de toute l'Europe, car tous apprécient à sa formidable valeur le combat que vous menez pour l'Europe à travers le combat pour l'Algérie. Camarades français, vous n'êtes plus seuls"(4).

Les propos de THIRIART ne sont pas des rodomontades ou de la propagande. Du côté du régime gaulliste, on prend très au sérieux la menace que fait peser l'Organisation. Dans son ouvrage, "LA TRAGEDIE DU GENERAL", l'historien gaulliste J.R.TOURNOUX précise que "Dans cette entreprise révolutionnaire, l'Algérie offre un tremplin" et cite les propos du Ministre français de l'intérieur du moment : "Depuis plusieurs années, la guerre d'Algérie sert de détonateur à des intrigues, à des desseins qui s'intéressent non à l'Algérie, mais à des ambitions politiques. Vous avez été, et vous êtes encore, des jouets dérisoires entre les mains expertes de certains manipulateurs de foules en panique. Voyez donc ces réunions tenues à Bruxelles ... Regardez ces orateurs en manches de chemises, ces gardes du corps fiers de leurs brassards, ces étrangers qui scandent "Algérie française !". Avez-vous compris"(5).

L'UTILISATION REVOLUTIONNAIRE DE L'AVENTURE DE L'O.A.S. PAR "JEUNE-EUROPE"

Le soutien de l'Organisation "JEUNE-EUROPE" à l'OAS sera officialisé par la création de la Mission "France 3", qui vise à organiser le soutien et la logistique des réseaux de l'OAS en métropole. C'est dans l'hebdomadaire "JEUNE-EUROPE" qu'est d'ailleurs annoncée la constitution de cette "Mission France 3" : "Si les forces de l'OAS semblent parfaitement coordonnées dans leur berceau algérien, les divers mouvements ou groupes qui s'en réclament dans l'Hexagone n'apparaissent pas tous aussi reliés soit en entre eux soit à l'Etat-Major. Le général SALAN, chef de l'OAS, a donc pris la décision de créer un organisme centralisateur en métropole pour unifier les méthodes et les moyens d'action. La Mission "France 3" chargée de ce travail vient d'être installée avec pour attribution, au nom du général SALAN, tous les moyens se rapportant à l'action répressive et les finances"(6).

"JEUNE-EUROPE" va d'ailleurs prendre totalement en main la propagande de l'OAS en France, en éditant notamment officiellement en Belgique l'édition métropolitaine du journal de l'OAS "APPEL DE LA FRANCE", qui est diffusée encartée dans l'hebdomadaire "JEUNE EUROPE". La réaction des autorités françaises, mais aussi belges, ne se fera pas attendre et l'organisation de THIRIART, en particulier sa section belge, vont connaître en Belgique même les foudres de la répression. Les perquisitions vont faire suite aux arrestations, aux saisies des comptes, des archives et du courrier de l'organisation. Plusieurs militants, et THIRIART lui-même, seront à plusieurs reprises arrêtés et incarcérés de nombreuses semaines sans que la justice et les polices belges ne parviennent à un résultat quelconque, tant la structuration de l'appareil clandestin de "JEUNE-EUROPE" est parfaite.

Vingt-cinq ans plus tard, Jean THIRIART devait d'ailleurs dresser le bilan de cette période : "J'ai fort bien connu les capitaines et les colonels de l'OAS, c'est moi qui aie annoncé à Radio-Luxembourg, avant tout le monde, que SERGENT avait pris la place d'ARGOUD. Je l'ai annoncé quelques heures après le rapt de celui-ci en Allemagne. Les décisions étaient prises non loin de Bruxelles... Un peu au sud... Le poumon extérieur de l'OAS fut le fait de JEUNE EUROPE en très grande partie"(7). Des propos qui font écho à ceux qu'il tenait en 1962 dans l'hebdomadaire "JEUNE-EUROPE" : "Le contrat politique et historique que l'ex OAS doit proposer à l'Europe combattante est celui-ci : dans l'immédiat toute l'Europe combattante soutiendra le combat de l'ANS et du CNR. Toutes les forces à mettre en ligne convergeront vers la lutte en France. La victoire acquise en France, celle-ci deviendra le premier Etat national-communautaire, une sorte de microcosme de l'Europe. Cette nouvelle "France" - en fait plutôt Europe comprimée - servira de base départ à la conquête idéologique, politique et militaire de toute notre patrie européenne jusqu'à Bucarest"(8).

"JEUNE-EUROPE" APRES L'ECHEC DE L'OAS

Hélas pour THIRIART et ses militants, l'OAS ne réalisera jamais les potentialités révolutionnaires qu'elle portait. Trop française, menée par des militaires par définition peu doués pour l'action clandestine et subversive, le combat de l'OAS sera désespéré et inutile. Lorsque se termine l'aventure de l'Algérie française et européenne, l'organisation de THIRIART s'apercevra qu'elle a évidemment perdu toute la mise qu'elle avait placée dans cette affaire. En effet, les réseaux français de l'organisation sont interdits, ses militants pourchassés ou en prison, comme ceux des autres organisations pro-Algérie française. La presse de l'organisation éditée en Belgique est interdite en France et ses responsables y sont poursuivis. Et l'image de marque de l'Organisation va souffrir longuement de l'aventure en étant associée à une aventure peu révolutionnaire au regard de ses autres protagonistes.

Le pouvoir gaulliste, qui n'a jamais été tendre et n'a jamais pratiqué le pardon des offenses, va continuer la répression même après la disparition de l'OAS. L'hebdomadaire "JEUNE-EUROPE" est, après "EUROPE-AFRIQUE", interdit de distribution sur le territoire métropolitain le 29 décembre 1963 sur demande du Ministère de l'Intérieur ("JOURNAL OFFICIEL" de la république française). Pour faire face à ces tentatives d'interdiction, une nouvelle édition sera publiée en France sous le titre de "L'EUROPE COMBATTANTE". Il s'agit en réalité d'un changement de titre purement et simplement le même journal publié à Bruxelles l'est donc sous deux titres. Cette tentative pour détourner la répression durera très peu de temps, de septembre 1964 à avril 1965, les responsables français étant poursuivis en justice. Gérard BORDES, responsable de "L'EUROPE COMBATTANTE", devra comparaître le 22 février 1966 sous le chef d'inculpation suivant : "Avoir à Paris, au cours des mois de septembre 64 à avril 65 inclus, en tout cas sur le territoire français et depuis temps non prescrit, sciemment mis en circulation, distribué et mis en vente le journal hebdomadaire de provenance étrangère "L'EUROPE COMBATTANTE", édité et imprimé à Bruxelles, n° 197 à 207 inclus, et ainsi repris sciemment sous un titre différent la publication du journal "JEUNE EUROPE", également édité et imprimé en Belgique, dont la circulation, la distribution ou la mise en vente en France avait été interdites par arrêté de M. le Ministre de l'Intérieur du 26 décembre 1963". BORDES sera condamné à une amende de 2000 francs français de l'époque, ce qui était assez lourd.

"JEUNE EUROPE" CONTRE L'EXTRÊME-DROITE

A la répression s'ajoutent les campagnes menées par les concurrents de l'organisation. En effet, de l'agitation et du débat idéologique lancé par THIRIART en 1960 est née une nouvelle génération de militants nationalistes en France, regroupée autour de Dominique VENNER, d'"EUROPE-ACTION" et de la "FEDERATION DES ETUDIANTS NATIONALISTES". Le corpus idéologique de celle-ci doit beaucoup, comme nous le verrons plus avant dans cette étude, aux thèses de Jean THIRIART, bien qu'aucune référence ne sera jamais faite à celui-ci, si ce n'est pour l'attaquer bassement. Les réseaux animés par VENNER et ses amis ne veulent absolument pas évidemment d'un concurrent agitant des thèses verbalement proches des leurs, quoique fondamentalement différentes au niveau de la vision de l'Occident et de l'impérialisme américain.

"Jeune-Europe" va devoir se battre sur deux tableaux, contre la répression gaulliste, mais aussi et surtout contre ses faux amis. Yannick SAUVEUR, premier historien de "Jeune-Europe" écrira à ce sujet ce qui suit : "A ces interdits qui gênent le développement de "Jeune Europe" en France, ajoutons les mauvaises relations avec les groupes de droite et d'extrême-droite français. "Jeune Europe" est perçu comme un concurrent gênant dont il faut à tous prix empêcher la percée. Ainsi les relations sont franchement hostiles entre "Europe-Action", La Fédération des Etudiants Nationalistes, d'une part, et le groupe "Jeune Europe". Des étudiants belges ayant assisté au congrès de la FEN de 1963 se font chahuter et insulter alors qu'ils procédaient à une distribution de journaux "Jeune Europe". C'est François d'ORCIVAL, aujourd'hui rédacteur en chef de l'hebdomadaire "Valeurs Actuelles", le plus farouche dans les épithètes injurieuses proférées à l'encontre des militants de "Jeune Europe"..." (9).

La réponse de "Jeune-Europe", publiée dans son hebdomadaire du 13 décembre 1963, marque le fossé qui sépare les deux organisations : "Il est regrettable que certains dirigeants de la FEN, aveuglés par un nationalisme étroit, s'efforcent ainsi de fermer à leurs troupes la seule voie qui puisse assurer à la France l'avenir nationaliste dont ils rêvent : l'Europe. S'ils ne veulent pas condamner la France à tomber complètement, définitivement sous la coupe des impérialismes étrangers, russes ou américains, il leur faut effectuer leur conversion européenne, nationale-européenne, ou comprendre que la place de belges ou d'italiens ou d'allemands est légitime à Paris, tout comme des français ont légitimement leur place à Bruxelles, à Rome ou à Madrid" (10).

Ce fossé va perdurer pendant plusieurs décennies, comme nous le verrons plus avant, puisqu'il va continuer jusqu'au début de ce nouveau siècle à séparer le courant communautariste des fractions nationales-révolutionnaires les plus avancées, notamment celles présentes au sein de la "Nouvelle droite".

La réponse politique de l'organisation "Jeune-Europe" en France va être la création d'une structure concurrente à la "Fédération des Etudiants Nationalistes", la "FEDERATION GENERALE DES ETUDIANTS EUROPEENS", qui voit le jour le 17 avril 1964, et qui édite le bulletin de liaison "EUROPE UNIVERSITE". Dans cette dernière, on définit les priorités du combat de le la FGEE : "Au-dessus des combats politiques traditionnels, nous luttons chaque jour pour la défense de l'étudiant européen, pour que se lève dans l'université française la moisson des militants pour une Europe forte, libre, unitaire, indépendante ... "(11). La création de la FGEE visait aussi, bien entendu, à faire face à la répression et à donner une structure légale aux réseaux de "JEUNE-EUROPE" en France qui ne pouvaient plus, en raison des interdictions légales, travailler sous ce nom.

Dans les buts que s'est fixé la nouvelle Organisation éclate d'ailleurs à nouveau le divorce avec la FEN. En effet, alors que les Communautaristes veulent une Europe indépendante de Washington, "EUROPE-ACTION" et les "CAHIERS UNIVERSITAIRES" de la FEN célèbrent le combat des marines au Vietnam et prônent un "empire occidental de Vladivostok à San Francisco", au nom d'un mondialisme blanc aux connotations racistes évidentes (une thèse que reprendra en des termes semblables quatre décennies plus tard un Guillaume Faye).

Malheureusement, l'expérience de la FGEE va rapidement avorter en raison de circonstances qui ne sont pas dues à la situation française, mais à l'évolution de l'Organisation "JEUNE-EUROPE" en Belgique. Celle-ci est en effet secouée en août 1964 par une purge interne menée par THIRIART, qui veut s'assurer le contrôle absolu. Jusque là s'étaient côtoyées une fraction révolutionnaire menée par THIRIART et une aile droitière. La tendance politique animée par Emile LECERF est exclue sans ménagements suite à un différent idéologique très important. LECERF et ses amis prônent en effet des thèses proches de celles défendues par "EUROPE-ACTION", à savoir un mondialisme blanc à connotations raciales, que combat THIRIART. En août 64 le divorce est définitif entre les deux hommes et LECERF est exclu de"JEUNE-EUROPE" et fonde un groupe nouveau sous le nom de "REVOLUTION EUROPEENNE". La "Fédération Générale des Etudiants Européens" derrière l'un de ses responsables, Jean-Claude JAQUARD, ami de LECERF, va suivre Lecerf et mettre un terme à l'aventure de la FGEE. L'Ambassade des USA appuie financièrement les exclus pour entraver l'action de THIRIART, qui les surnomme "les Marines".

UN NOUVEAU DEPART EN 1964 :

LE C.E.P.S.E. ET "LA NATION EUROPEENNE"

Dès le début 1964, THIRIART est conscient du fait qu'il faut remettre de l'ordre dans les structures de "JEUNE-EUROPE" en France, dont les réseaux ne suivent pas le développement alors harmonieux du reste de l'Organisation dans de nombreux pays européens, particulièrement en Belgique et en Italie. En avril 1964, il réorganise administrativement les réseaux français de l'Organisation, la métropole étant divisée en onze "zones" administratives, toutes indépendantes les unes des autres et qui dépendent directement de la Centrale de Bruxelles, ceci dans le but de mettre un terme au parisianisme excessif qui régnait alors.

La même année est créée une nouvelle structure officielle pour l'Organisation en France, tenant compte des problèmes de répression rencontrés : ce sera le "Centre d'Etudes Politiques et Sociales Européennes", le CEPSE, qui connaîtra une activité fructueuse et d'importants développements en France, mais aussi en Belgique et en Espagne (où l'Organisation connaît également des problèmes du fait du monopole du parti unique exercé par le Franquisme). Le CEPSE va servir de vitrine à l'Organisation en France et lui permettre aussi d'aborder de nouveaux horizons politiques, les Communautaristes étant bien conscients du fait que le combat ouvert avec l'extrême-droite nationaliste française lui bouchait l'espace du côté nationaliste.

Ainsi, le CEPSE participe les 1er, 2 et 3 octobre 1965 au congrès du "MOUVEMENT FEDERALISTE EUROPEEN" à Cannes, voulant assurer une influence des thèses communautaristes au sein de la mouvance fédéraliste européenne, "Un responsable du CEPSE participait au congrès en tant que délégué, tandis que 35 observateurs français et italiens étaient présents à Cannes, sous la conduite de Gérard BORDES pour la France et de PierFranco BRUSCHI pour l'Italie"(12).

Le CEPSE parallèlement publie un bulletin d'information très bien fait sous le nom de "CEPSE INFORMATIONS".

Le combat du CEPSE sera réactivé d'ailleurs, deux décennies plus tard, lorsqu'en accord avec Jean THIRIART, le PCN fera renaître un nouveau CEPSE, destiné à servir de Centre d'étude au "Parti Communautaire National-européen" nouvellement constitué en 1984, et qui est toujours aujourd'hui en activité.

Parallèlement, l'Organisation de Jean THIRIART veut se doter d'une nouvelle tribune crédible en France et répondre par-là aux interdits qui frappent les publications de l'Organisation éditées en Belgique. En novembre 1965, paraît donc le numéro zéro de "LA NATION EUROPEENNE", qui connaît deux éditions en langue française, l'une publiée à Paris, ce qui la rend inattaquable au point de vue interdiction, l'autre à Bruxelles. La "NATION EUROPEENNE" va rapidement devenir la tribune de l'Organisation dans tout l'espace francophone et conduira à la disparition de ses autres journaux. Une édition italienne sera également publiée jusqu'en 1970 sous le titre de la "LA NAZIONE EUROPEA". Tribune moderne, extrêmement bien faite pour l'époque, largement diffusée en kiosques, "LA NATION EUROPEENNE" élargira considérablement l'influence du courant communautariste, puisque s'y exprimeront de nombreux intellectuels et hommes politiques, aussi bien européens que du Tiers-Monde. En février 1969, paraîtra son dernier numéro en Français, le numéro 30.

L'Organisation apporte entre 1965 et 1969 tout son effort sur sa nouvelle publication et sa commercialisation, un "Club des amis de La Nation Européenne" est mis en place, des réunions ont lieux, des banquets aussi. "La publication est diffusée par les NMPP pour ce qui concerne la France. A son apogée, la revue peut compter sur 2.000 abonnés. Le tirage a toujours été de 10.000 exemplaires. Le comité de rédaction lui, est véritablement européen : Français, Belges, Italiens, Suisses, Allemands, Portugais, Néerlandais, Britanniques, Espagnols y collaborent au coude à coude dans un esprit de réelle fraternité européenne. La "Nation Européenne" peut encore compter sur des correspondants à l'étranger : au Brésil, en Argentine, en Algérie, en Egypte. "la Nation Européenne", à la différence de ce qu'avait été jusqu'à présent la presse du mouvement, va être un journal "ouvert". Elle accueille des collaborateurs extérieurs... et d'autres personnalités encore." C'est ainsi que Yannick SAUVEUR dressait le bilan de la publication du nouveau mensuel communautariste (13).

1965 : LE LANCEMENT DU

"PARTI COMMUNAUTAIRE EUROPEEN" (P.C.E.)

Parallèlement, est lancé en 1965, en même temps que "LA NATION EUROPEENNE", le "Parti Communautaire Européen" (PCE), dont le numéro 0 de "LA NATION EUROPEENNE", d'octobre 1965, reprend l'appel de constitution "Il faut sauver l'Europe", cosigné par trente cadres, et qui présente la spécificité du nouveau parti : " Le Parti Communautaire Européen répondra à trois exigences fondamentales. Tout d'abord être agrégateur - il ne peut être question d'une vague "union" en contre-plaqué qui se décollerait à la première pluie -; ensuite, il doit être supranational puisqu'il est la préfiguration de l'Europe, puisqu'il en est le microcosme; enfin, il doit être doté d'une volonté révolutionnaire, car il s'attaque à des obstacles considérables. Pour fonder ce Parti, il faudra faire appel à toutes les volontés sincères. Ce Parti doit être un contenant et non un contenu. Aucun ostracisme ne peut limiter le recrutement, aucun ostracisme à l'égard de personnes, à l'égard d'idéologies. Il ne saurait être question de faire du Parti une faction. Ce parti sera celui de tous les Européens, de quelque horizon philosophique qu'ils viennent."

Il s'agit alors pour l'Organisation de Jean THIRIART, qui débouche alors sur sa maturité, de se donner une nouvelle image de marque et de rompre avec la catégorisation non fondée à l'extrême-droite, dont elle souffre. L'Organisation est alors engagée, alors que la décolonisation a pris fin, dans une nouvelle phase de son combat contre l'impérialisme américain et pour la libération et l'unification de l'Europe, combat largement ouvert sur les luttes du Tiers-Monde, où Jean THIRIART recherche maintenant un nouveau poumon extérieur et un "Etat tremplin", ce qui l'a d'ailleurs - ironie de l'histoire - conduit à nouer des relations cordiales avec le FLN au pouvoir en Algérie, où le PCE possède maintenant ses entrées, comme en Irak, au Liban ou en Egypte, ouvertures que concrétise un voyage officiel de Jean THIRIART dans ces pays en 1968.

Pourtant l'échec provisoire attend l'Organisation. En effet, si celle-ci a construit un cadre politique exceptionnel et développé une doctrine politique originale aux dimensions de l'Europe, le "Communautarisme national-européen", elle n'a pu trouver le terrain révolutionnaire où déboucher. Jean THIRIART a commis dans les Années 60 une erreur fondamentale : celle de tout miser sur la constitution d'un cadre prêt à une action directe, immédiate dans le cadre d'une situation révolutionnaire. Né dans les affres et les tourments de la décolonisation, l'Organisation va au cours de ses premières dix années d'existence constamment rechercher un terrain révolutionnaire immédiat. Après la décolonisation, ce seront les combats anti-impérialistes du Tiers-Monde (THIRIART croyant à une troisième guerre mondiale à venir entre la Chine et les Etats-Unis), le combat de libération que venait d'engager le peuple palestinien contre l'impérialisme et le Sionisme, les combats d'Amérique latine et autres.

Les troubles étudiants de 1968, particulièrement en Italie où ils auront une toute autre portée qu'en France et, qui verront les militants du PCE et de "JEUNE-EUROPE" combattre au coude à coude avec les Organisations marxistes-léninistes maoïstes, conforteront l'illusion qu'une situation révolutionnaire peut alors exister en Europe.

Malheureusement pour THIRIART et ses militants, nous sommes au milieu des "Golden sixties" et les passions d'un moment ne déboucheront jamais sur la situation de détresse profonde dans laquelle le sociologue Jules MONNEROT, dans sa "SOCIOLOGIE DES REVOLUTIONS", voit la condition essentielle et nécessaire au commencement d'une révolution.

A "JEUNE-EUROPE" et au PCE, il manquera la construction d'un appareil dans la durée et la capacité pour celui-ci à exister politiquement et idéologiquement en dehors d'une période de troubles. Cela impliquait particulièrement une participation aux élections et au parlementarisme. Jean THIRIART, pour des raisons qui tiennent autant à l'éthique qu'à la morale, s'y refusera malheureusement toujours concrètement, ne souhaitant pas tomber dans ce qu'il appelait à l'instar de LENINE "le marais du parlementarisme". C'était oublier que le Parti bolchevique lui-même participa à toutes les Douma du Régime tsariste.

Fin février 1969, alors que l'espoir d'un poumon extérieur s'est définitivement fermé après le voyage de Jean THIRIART dans les pays arabes où il proposa vainement la création de "BRIGADES EUROPEENNES"(14), l'Organisation va devoir cesser ses activités politiques ouvertes. Celle-ci est en effet financièrement exsangue, THIRIART, optométriste de profession et leader syndical de celle-ci, a laissé dans l'aventure la plupart des magasins de sa chaîne d'optique et est au bord de la faillite. Il est aussi profondément déçu que ce soit sur le plan politique ou humain, il va donc abandonner la politique militante.

Des cadres de l'Organisation, notamment BORDES et BRUSCHI, en France et en Italie, tenteront de continuer l'action de celle-ci sans THIRIART, mais disparu celui qui en était à la fois l'âme et le moteur, l'Organisation va définitivement arrêter son activité militante en 1970 (et non pas en 1969, comme c'est encore trop souvent écrit), le réseau italien jetant le gant en dernier.

Au travers de ces années noires, l'Organisation va survivre jusqu'au début des Années 80 sous la forme larvée du réseau relationnel qu'anime THIRIART, publiant circulaires confidentielles, trouvant une tribune pour ses thèses dans les publications syndicales de Thiriart, reconverti en leader syndical européen des Opticiens et optométristes, et que publie la société de presse "La Nation européenne", maintenant le contact entre un noyau de militants.

1969-1971 : LE TEMPS DES GROUPUSCULES

ET DES REVUES EPHEMERES

De l'éclatement de l'Organisation vont éclore une série de groupuscules et de publications éphémères, où l'on retrouve cependant encore l'influence des thèses communautaristes, mais que THIRIART refusera toujours d'appuyer. L'une des plus durables sera le bulletin lyonnais "SOCIALISME EUROPEEN", qui publiera 25 numéros de 1967 à septembre/octobre 1971, en marge des milieux nationaux-révolutionnaires et socialistes officiels, notamment de la "Fédération de la Gauche démocrate socialiste" et de la "Convention des Institutions républicaines" de François MITERRAND et Hubert DUBEDOU, futur maire socialiste de Grenoble (15). La revue défend un "socialisme révolutionnaire, pragmatique, libertaire et fédéraliste, communautaire et organique, humaniste, européen"(16), où l'on retrouve, mêlées à d'autres influences, certaines thèses de THIRIART. Ainsi le numéro trois souhaite "une Europe de Brest à Bucarest".

De nombreuses autres petites publications paraissent; toutes sont situées dans l'optique propagandiste des derniers temps de l'Organisation en Italie, c'est-à-dire que l'on pourrait les qualifier de "version gauchisante", alors dans le goût de l'époque, des thèses communautaristes. Ainsi paraissent "REVOLUTION SOCIALISTE EUROPEENNE" ou "LE COMMUNARD", "organe de combat des étudiants socialistes européens". Publications où brillent les derniers feux bien affaiblis et bien agonisants de ce qui fut la grande Organisation communautariste des Années 60.

Nous devons préciser que le journal "POUR UNE JEUNE EUROPE" et le groupe du même nom mené par Nicolas TANDLER, n'ont eux rien à voir avec l'héritage communautariste, malgré le sous-titre d'"organe de combat socialiste européen". Créés à la suite d'un voyage de militants nationalistes français en Italie, où ils ont pu voir l'expansion de la "GIOVANE EUROPA", section italienne de l'Organisation de Jean THIRIART qui est alors en 1969 à son apogée, ce groupe et cette revue n'en représentent pas moins une confusion idéologique intégrale où, si l'on retrouve quelques vocables tirés de la doctrine communautariste, on assiste globalement à des positions opposées à celle-ci. Le groupe "POUR UNE JEUNE EUROPE" finira d'ailleurs par se fondre dans le mouvement nationaliste français "ORDRE NOUVEAU".

L'ORGANISATION LUTTE DU PEUPLE (OLP)

Il faudra attendre 1971 pour voir renaître en France une activité militante, mais sans l'appui e THIRIART, la fraction d'une Organisation européenne communautariste digne de ce nom. Ce sera l'"ORGANISATION LUTTE DU PEUPLE", l'OLP. Les diverses fractions de "LUTTES DU PEUPLE" sont issues en droite ligne de "JEUNE-EUROPE", dont elles reprennent une grande partie de la doctrine. "Jean THIRIART... n'est pas à proprement parler (le) ou (un) maître à penser, du moins constitue-t-il une très sérieuse référence pour tout ce qui concerne l'Europe"(17). La référence, outre de nombreuses citations de Jean THIRIART, est particulièrement explicite au niveau de certaines sections, puisque le "bulletin de lutte des jeunes OLP" de TOURS porte le titre de "JEUNE EUROPE UNITAIRE ET COMMUNAUTAIRE".

"LUTTE DU PEUPLE", est née avec sa fraction italienne, "LOTTA DI POPOLO", née de la fusion des débris de la "GIOVANE-EUROPA" de Jean THIRIART avec différents mouvements étudiants nationalistes mais aussi gauchistes. Rapidement seront créées des Organisations sœurs en Espagne, en Allemagne, en Suisse et en France.

La fraction française, la plus importante après l'italienne, l'"ORGANISATION LUTTE DU PEUPLE" (OLP) "a été fondée fin 1991 par quelques dissidents de gauche nationalistes d'"ORDRE NOUVEAU" et des socialistes européens de "POUR UNE JEUNE-EUROPE..."(18), le leader en est Yves BATAILLE. "En Italie, ils prennent contact avec divers groupes extraparlementaires, mais plus particulièrement avec les éléments les plus avancés du Nationalisme européen. Ces derniers viennent de créer l'"ORGANIZAZIONE LOTTA DI POPOLO". De retour en France, les nouveaux combattants européens vont jeter les bases d'un mouvement : ce n'est ni plus ni moins que la réplique de "LOTTA DI POPOLO". La fraction française de l'OLP est née"(19).

La fraction allemande est la "NRAO/ NAZIONALE-REVOLUTIONÄR AUFBAU ORGANISATION", connue aussi sous le nom de "SACHE DES VOLKES" ("la Cause du Peuple").

L'idéologie des diverses fractions de l'OLP présente un mélange des thèses de Jean THIRIART et d'un Maoïsme "à l'européenne". Si la revendication d'une "Europe unitaire et communautaire" est dans la droite ligne doctrinale de "JEUNE-EUROPE", l'OLP présente une importante mutation idéologique (20). Le Maoïsme, qui était un simple allié tactique envisagé à un moment donné par Jean THIRIART, est devenu un modèle politique à suivre, un exemple. Comme le fait remarquer avec pertinence Yannick SAUVEUR, "...que dire de ce mouvement ? Il est encore difficile de le classer. Ses militants sont-ils des trotskistes de l'extrême-droite ? Des fascistes de gauche ? Des communistes de droite ? Ou des inclassables ? En Italie, le public, les média et les mouvements de l'extrême-gauche à l'extrême-droite ont eu les mêmes problèmes et finalement une étiquette est venue d'on ne sait trop où, et qui accolait à "LOTTA di POPOLO" l'étiquette qui se voulait injurieuse de mouvement "nazi-maoïste". En fait, il est évident que le mouvement en question n'est ni nazi, ni maoïste, mais la juxtaposition de ces deux mots traduit bien, selon nous, la réalité de l'Organisation "LUTTE du PEUPLE", de la synthèse entre une certaine extrême-gauche et une certaine extrême-droite. Curieux cocktail en vérité... Si, en définitive, on admet la réalité d'un courant nazi-maoïste, on est amené à se demander s'il n'est pas tout simplement la transposition du National-bolchevisme, le Nazi-maoïsme n'étant que le national-bolchevisme des années 70, le cadre national ayant changé. Ce n'est plus l'Allemagne mais l'Europe. De même, le Bolchevisme n'est plus celui des années 30. MAO est apparu depuis et incontestablement son apport idéologique, pratique... est considérable. Finalement, l'Europe unitaire et communautaire que veut réaliser l'OLP n'est ni plus ni moins que la transposition de l’œuvre de MAO adaptée au cadre européen et aux mentalités du peuple européen"(21).

Les diverses fractions de l'OLP disparaîtront à la fin des années 70, sans jamais avoir réussi de percée politique, la française par lassitude, l'italienne sous les coups d'un pouvoir ultra répressif. Néanmoins, le combat de l'OLP n'aura pas été inutile. L'OLP va en effet servir de trait d'union entre les militants nationaux-révolutionaires des années 70 et celle qui surgira au début des années 80 avec le PCN. L'OLP aura eu ce mérite immense, celui de maintenir la braise sous la cendre, celui de transmettre la flamme.

Elle aura aussi le mérite, et il faut lui en rendre justice, d'avoir amené à la connaissance du public militant les thèses des courants national-bolcheviques russe et allemand des Années 1920-30 et en particulier d'Ernst NIEKISCH. La résurgence du National-bolchevisme et en particulier des thèses de NIEKISCH à partir du début des Années 80, prend incontestablement sa source dans le travail d'approfondissement doctrinal de l'OLP, ce qu'ignorent la plupart des contempteurs de ce courant à commencer par René MONZAT qui, dans son livre "LES DROITES NATIONALES ET RADICALES EN FRANCE", commet une erreur parmi beaucoup d'autres en voyant uniquement l'émergence des thèses de NIEKISCH au sein de la "Nouvelle-droite" au début des Années 80 (sic).

Parmi les nombreux animateurs de l'OLP, tous fort jeunes, un seul continuera à rester actif dans la mouvance nationale-révolutionnaire à l'âge adulte : Yves BATAILLE, que l'on retrouvera dans de nombreux combats jusqu'au début des années 90 et qui est maintenant, notamment, un des collaborateurs de la presse du PCN.

L'influence des thèses communautaristes et de l'OLP se fait également sentir dans d'autres publications, notamment dans une publication universitaire, les "CAHIERS DU CDPU", le "Centre de Documentation Politique et Universitaire" d'Aix-en-Provence, qu'anime Michel SCHNEIDER. Certes ce bulletin n'est pas une publication communautariste, et il s'éloigne souvent des préoccupations de THIRIART, mais il n'en ouvre pas moins ses colonnes à certaines des thèses du courant communautariste européen, Jean THIRIART lui-même y fera sa seule apparition politique publique au cœur des Années 70, en donnant une longue interview, qui fera scandale à l'époque, en 1975, aux "CAHIERS DU CDPU"(22) dont Yves BATAILLE est alors le rédacteur en chef. Les conséquences de celle-ci seront plus importantes pour le Communautarisme que ne le pouvait laisser prévoir la diffusion restreinte de la revue universitaire. Des exemplaires de celle-ci parviendront en Belgique et y feront découvrir la personnalité de Jean THIRIART à une nouvelle génération de militants européens et particulièrement à Luc MICHEL, qui fondera, au début des Années 80, la génération moderne du Communautarisme et redonnera une forme politique ouverte à l'Organisation de THIRIART.

LE "CENTRE D'INITIATIVE PROGRESSISTE EUROPEEN" (C.I.PR.E.)

Il faut donner une place importante au "Centre d'Initiative Progressiste Européen", le CIPRE, créé par Yannick SAUVEUR, non parce que ce mouvement a eu une grande importance politique, mais parce qu'il a permis de déboucher directement sur la seconde génération du Communautarisme européen, parce qu'il a assuré une transition publique vers les milieux nationaux-révolutionnaires après l'échec de l'OLP, mais aussi parce que ses travaux doctrinaux de qualité et le travail de recherche politique mené par ses animateurs, dont Yannick SAUVEUR, vont faire beaucoup pour relancer le Communautarisme.

En octobre 1974, paraît le premier numéro d'une revue trimestrielle "DIMENSION EUROPENNE, éditée par le CIPRE. Celui-ci s'"est donné pour objectif la structuration et la diffusion de l'idée européiste, ouvert à tous ceux, qu'ils soient totalement ou partiellement acquis aux thèses européistes, qui veulent oeuvrer pour le développement de cette idée." La revue et le centre sont animés par une petite équipe, autour de Yannick SAUVEUR et Henry CASTELFERRUS. Le Centre développe des groupes à Toulon, Amiens, Bayonne, il est significatif qu'il soit absent de Paris et l'absence de tout parisianisme contribuera à donner, comme l'annonce sa revue, une dimension totalement européenne au combat mené par cette organisation.

Le CIPRE est en fait né d'une scission de l'"ORGANISATION LUTTE DU PEUPLE" : "Le CIPRE regroupe la "tendance de gauche" de l'organisation Lutte du peuple, elle-même tentative de résurgence d'une organisation autour des orientations de THIRIART" (23), dira René MONZAT. En fait, quelques cadres du mouvement n'ont pas voulu suivre l'OLP dans sa surenchère verbale révolutionnaire et gauchisante, mais tout au contraire ont voulu donner au combat européiste et aux idées communautaristes un "emballage grand public" acceptable. "DIMENSION EUROPENNE" publiera 10 numéros jusqu'en 1977 et consacrera principalement ses colonnes à l'approfondissement et à la modernisation des thèses communautaristes, publiant notamment un "Manifeste européiste".

Le CIPRE créera un semblant d'organisation européenne, en Italie et en Espagne, où ses sections sont issues des fractions de l'OLP, et aura des contacts en Allemagne et en Autriche avec des mouvements plus ou moins proches.

Le CIPRE tiendra, en Autriche, à Vienne, les 12 et 13 septembre 1977, un "Premier Congrès européiste", qui sera malheureusement un échec et qui verra la disparition de l'organisation. Pourtant, ce congrès porte beaucoup d'espoirs, comme le précise le CIPRE dans l'éditorial du N° 10 de "Dimension européenne" (4e Trimestre 1977) : "Trois années seulement après sa création, le centre d'initiative progressiste européen existe dans cinq pays et il organise le premier congrès européiste qui se déroulera à Vienne les 12 et 13 novembre 1977. Ainsi, s'amorce véritablement une entreprise extrêmement ambitieuse et dont l'accomplissement exigera une immense labeur : la construction du parti progressiste européen, supranational, seul capable d'unifier l'Europe et de garantir son indépendance."

Les thèses développées par le CIPRE et "DIMENSION EUROPEENNE" serviront de base aux travaux doctrinaux du IIème Congrès du PCN en 1986.

Le CIPRE étudiera particulièrement les structures du futur Etat européen négligées par THIRIART qui était trop engagé dans l'action directe. Il développera particulièrement des thèses sur la place de la région socio-économique dans l'Europe unitaire et communautaire, qui servent encore aujourd'hui de base à la conception régionaliste du Communautarisme européen, telle que l'expose le PCN.

L'échec du Congrès de Vienne verra la disparition rapide du CIPRE.

C'est aussi à Yannick SAUVEUR que l'on doit la première étude d'ensemble sur la première génération du Communautarisme européen et sur "JEUNE-EUROPE", dans un mémoire présenté, devant l'Institut des Sciences Politiques de l'Université de Paris, sous le titre "JEAN THIRIART ET LE NATIONAL-COMMUNAUTARISME EUROPEEN". Diffusé dans un premier temps à compte d'auteur par THIRIART lui-même, puis dans un second temps par les Editions MACHIAVEL à partir de 1983, elles feront connaître à une nouvelle génération politique l'héritage communautariste et la portée du combat de "JEUNE-EUROPE". La publication de cette étude sera décisive pour la renaissance politique ouverte d'un courant communautariste orthodoxe, auquel participera Jean THIRIART lui-même.

LA NAISSANCE EN 1984 DE LA SECONDE GENERATION COMMUNAUTARISTE : LE P.C.N.

C'est à nouveau de Belgique, comme au début des Années 60, que la seconde génération du Communautarisme national-européen va prendre son essor. En juin 1984, se tient le Congrès de fondation d'un nouveau parti politique, le PCN, le "Parti Communautaire national-européen". Celui-ci, qui fait explicitement référence à Jean THIRIART, a comme doctrine officielle le "COMMUNAUTARISME NATIONAL- EUROPEEN", dont il propose une version modernisée, élargie, et strictement orthodoxe. Jean THIRIART soutient directement la naissance du nouveau parti, où il joue un rôle de conseiller politique, ne souhaitant définitivement plus s'engager sur le terrain militant; il offre également son appui financier, matériel et moral à la nouvelle organisation politique.

Le PCN, bien entendu, n'est pas né subitement. Il est le résultat de l'héritage politique de l'organisation de THIRIART, dont il assure la continuité avec les Années 60 et 70. Il est également le résultat de la rencontre le Luc MICHEL et de Jean THIRIART EN 1982. Il est aussi le résultat d'une démarche politique de plusieurs années qui a conduit, notamment, son président-fondateur Luc MICHEL au Communautarisme. Celui-ci découvre les thèses de Jean THIRIART au milieu des années 70. Activiste dès 14 ans dans la mouvance pro-palestinienne qui soutient le FPLP un peu partout en Europe, il est en effet brièvement lié pendant quelques mois à la publication le "NOUVEL EUROPE MAGAZINE" et à une structure militante, le "FRONT DE LA JEUNESSE" (alors constitué en syndicat étudiant et universitaire. La dérive activiste viendra après 1978), dont il dirige la fraction nationale-révolutionnaire. Ce groupe est issu du groupe "REVOLUTION EUROPEENNE". Certes, ce groupe défend alors des thèses communautaristes abâtardies et déformées, mais la volonté européiste et révolutionnaire y est alors réelle et l'anti-américanisme souvent virulent. C'est seulement après 1978 que ce groupe politique prendra des orientations réactionnaires et droitières.

C'est là que circulent encore les derniers exemplaires du livre de Jean THIRIART, "L'EUROPE, UN EMPIRE DE 400 MILLION D'HOMMES" et "LA GRANDE NATION, L'EUROPE UNITAIRE".

A la fin des années 70, le groupe de militants nationaux-révolutionnaires que dirige Luc MICHEL s'oriente résolument vers l'adoption des thèses communautaristes dans lesquelles il voit une doctrine claire et un guide inégalé pour l'action.

En 1981, est fondé à Charleroi le "FRONT NATIONALISTE", une organisation nationaliste-révolutionnaire qui existera jusqu'en avril 1984. A la grande différence de "JEUNE-EUROPE", le groupe, qui comprend des membres qui ont déjà une longue expérience politique et qui sont conscients de la nécessité de durer politiquement, ne refuse pas l'action électorale. Des listes "FRONT NATIONALISTE" seront d'ailleurs présentées aux élections communales belges de 1982. L'organisation va se développer rapidement, mais éphémèrement à Bruxelles et en Wallonie, sous le sigle bilingue français/néerlandais "FRONT NATIONALISTE/NATIONALISTISCH FRONT" (FNF). La référence à Jean THIRIART y est déjà constante. L'ambition du Front est alors de présenter des listes aux élections européennes de 1984 et de déboucher de façon majeure sur la scène politique belge. Malheureusement, la constitution de l'organisation en "Front" et non en parti unitaire et structuré va lui coûter cher et la qualité humaine du recrutement ne sera pas à la hauteur des ambitions affichées. Le FNF est incapable de se présenter aux élections européennes de 1984.

Par ailleurs, l'aile nationale-révolutionnaire la plus dure, qui l'anime et contrôle le Bureau politique, vit depuis de longs mois une nouvelle expérience politique : l'Europe est alors en pleine de crise des "EURO-MISSILES", où les Etats-Unis, au travers de l'OTAN, veulent imposer sur le sol européen des armes atomiques de terrain qui transformeraient l'Europe en cas de Troisième guerre mondiale en champs de bataille dévasté par l'holocauste nucléaire. Partout en Europe, à l'instar de la mouvance "nationale-neutraliste" regroupée autour des "Grunen", les Verts allemands naissants (et où militent de nombreux nationaux-révolutionnaires et nationaux-bolcheviques), des militants politiques de tous bords, d'extrême-gauche, pacifistes, mais aussi nationaux-révolutionnaires, manifestent contre les "EURO-MISSILES". L'un des sites choisis est la base aérienne de Florenne près de Charleroi, où se développe une intense activité militante. C'est là que les militants du "Front Nationaliste" vont rencontrer des militants d'extrême-gauche, issus pour certains de la mouvance maoïste. Très vite ceux-ci vont apprendre à s'apprécier mutuellement.

De leur rencontre, et de l'échec du FNF, va naître un nouveau parti politique : le PCN. Nous avons étudié ailleurs la naissance et l'historique du PCN (24) et nous n'y reviendrons pas ici.

Dès le départ, celui-ci affiche une volonté européenne et développe des contacts dans d'autres pays que la Belgique, particulièrement en Espagne, à BARCELONE où milite José QUADRADO COSTA, qui sera une des chevilles idéologiques du nouveau parti, et en France. Dès cette époque, et avec le soutien, l'appui et l'accord de THIRIART, il s'agissait d'offrir au "Communautarisme national-européen" un nouveau départ. Il s'agissait d'actualiser la doctrine créée par Jean THIRIART et ses collaborateurs de "JEUNE-EUROPE" dans les années 60, de l'adapter au XXème siècle finissant, d'en faire une idéologie et une doctrine révolutionnaire tournées vers le XXIème siècle.

La continuité de l'orthodoxie doctrinale entre le "Communautarisme" de la première génération, celle de "JEUNE-EUROPE", et celui de la deuxième génération, celle du PCN, est claire et évidente. Elle a été soulignée par tous les commentateurs politiques. Néanmoins, le "Communautarisme" de l'époque de "JEUNE-EUROPE" restait fort marqué par le départ à droite de l'Organisation et en particulier par un anti-communisme que les initiateurs du nouveau parti trouvaient désuet, d'autant plus que de nombreux responsables du PCN venaient de la gauche et de l'extrême-gauche, politique ou syndicale.

Le "Communautarisme" de la seconde génération, celle du PCN, se définit donc par une libération totale des apports et des scories issus de la droite, qui hypothéquèrent lourdement "JEUNE-EUROPE", et se caractérise aussi par une large ouverture aux idéologies marxistes-léninistes et nationales-révolutionnaires. Cette démarche allait d'ailleurs clairement dans le sens du travail entrepris a cette époque par Jean THIRIART et que l'on a qualifié de "théorie euro-soviétique". En recueillant l'héritage doctrinal de la génération Communautariste des Années 60 et 70, le PCN devait déboucher sur la scène politique avec une orthodoxie doctrinale constituée et parvenue dès le départ à maturité. C'est une particularité rare qui mérite d'être soulignée

L'ACTION DE LA REVUE

"CONSCIENCE EUROPEENNE" (1982-1987)

Depuis 1982, est aussi publiée la revue "CONSCIENCE EUROPEENNE", qui joue le rôle d'un laboratoire d'idée pour relancer l'idéologie communautariste et qui devient, en 1984, l'organe officiel francophone du PCN.

Bien diffusée en France, "CONSCIENCE EUROPEENNE" aura une influence importante et fera connaître à une nouvelle génération le Communautarisme, l’œuvre de Jean THIRIART et l'expérience de "JEUNE EUROPE". En 1985, sont mis en place des "Comités de soutien à la revue CONSCIENCE EUROPEENNE", notamment à Paris, où le responsable est Jean-Pierre VANDERSMISSEN, un ancien cadre de "JONG EUROPA", la section néerlandophone "de "JEUNE-EUROPE", installé à Paris depuis le milieu des années 60.

L'action du PCN rencontre un écho favorable au sein de nombreux groupes, notamment la revue "LE PARTISAN EUROPEEN" et le "FORUM PROVENCE", sur lesquels nous allons revenir, mais aussi dans la mouvance nationale-révolutionnaire. En 1986 et 1987, des campagnes d'affiches sont d'ailleurs mises en place sur tout l'espace francophone, à Bruxelles, Charleroi, Lille, Paris et Marseille, notamment une campagne de soutien du PCN à la Libye après l'agression américaine de 1985 et une seconde campagne, menée par les "Comités de soutien de CONSCIENCE EUROPEENNE", qui aura un retentissement important sur le thème "Impérialisme américain, sionisme : un seul ennemi pour la nation européenne".

Entre juin et novembre 1987, le PCN tente alors une première fois de mettre sur pieds une organisation européenne. Une série de réunions ont lieu, notamment en France, à Marseille en juin 1987 avec la participation de Jean THIRIART et de Yannick SAUVEUR, et à Paris en novembre 1987, où Yves BATAILLE interviendra également. Si tous les participants sont d'accord sur la nécessité de relancer une organisation politique paneuropéenne, les moyens manqueront cruellement et beaucoup des participants n'auront pas la volonté de voir aboutir un projet d'une telle importance.

Fin 87, le PCN doit donc tirer les conclusions qui s'imposent et recentrer son action en Belgique afin de s'assurer, seul, des bases solides et durables. Il est bien certain alors que le succès sera loin d'être immédiat et qu'il faudra durer.

Fin 87, la revue "CONSCIENCE EUROPEENNE" arrête sa parution pour des raisons financières. Ce sera d'ailleurs l'origine des rumeurs malveillantes et totalement non fondées, propagées notamment dans les milieux nationaux-révolutionnaires en France, selon lequel le parti aurait été dissous à cette époque. Bien au contraire, le PCN se restructure alors et se recentre en Belgique francophone, participe à tous les niveaux d'élections dès 1987 et se développe lentement mais sûrement, jusqu'à la reprise de son essor européen en 1993.

Le Bilan de la première série "CONSCIENCE EUROPEENNE" est indéniablement positif. La revue et sa mouvance ont joué pendant ces années 1982-87 un rôle capital et décisif. Malgré la conspiration du silence, malgré les attaques sournoises dont elle fut l'objet, "CONSCIENCE EUROPEENNE" traça la route, éclaira le chemin, ouvrit de multiples débats sans lesquels beaucoup de positions politiques actuelles n'auraient pas été possibles. Il faut ici saluer nos camarades du "PARTISAN EUROPEEN", qui seuls dans les milieux NR brisèrent cette chape de plomb et nous offrirent une tribune dans leurs publications en 1987.

L'essor actuel des thèses nationale-européennes, de Lisbonne à Moscou, est né dans ce laboratoire d'idées qui compléta et amplifia le travail éditorial animé par l'équipe rédactionnelle de la revue. Que l'on songe en particulier au numéro spécial, tiré à vingt-cinq mille exemplaires, sur "LES COMMUNISTES DE WASHINGTON", qui fut d'ailleurs expédié à l'époque à des milliers de militants et de responsables communistes en France et en Belgique, et qui obligea notamment une des principales organisations d'extrême-gauche belge à reprendre des positions anti-américaines, alors qu'elle était devenue, de manière stupide et ridicule, anti-soviétique, en copie de positions chinoises passéistes. Que l'on songe aussi aux brochures publiées en numéro spéciaux sur "LE PARTI DE L'EUROPE" ou les "ORIENTATIONS NATIONALES-REVOLU-TIONNAIRES", respectivement publiées par THIRIART et Luc MICHEL, et qui sont aujourd'hui les textes de base du mouvement national-révolutionnaire européen, après être passées inaperçues au moment de leur publication. La première série de "CONSCIENCE EUROPEENNE", ce fut cela, et surtout cela : un chemin tracé, une pensée semée. (25)

"LE PARTISAN EUROPEEN" (1986-89)

Entre 1986 et 1989 est éditée à BEZIERS une revue intitulée "LE PARTISAN EUROPEEN". Celle-ci se constitue à la convergence de deux courants doctrinaux, d'une part le Communautarisme européen et l’œuvre de Jean THIRIART, d'autre part la tendance "Révolution conservatrice" de la Nouvelle-droite. Jean THIRIART y est une référence solide et constante. Par ailleurs, le "PARTISAN EUROPEEN" affiche une tendance nationale-bolchevique ouverte. A la revue, est liée une formation politique le "FORUM PROVENCE", qui suit également l'orientation nationale-bolchevique et qui s'exprimera notamment au cours de la Guerre du Golfe en soutenant l'Irak contre l'agression américaine. L'un des principaux animateurs de la revue est Thierry MUDRY, qui fut le premier à briser dans les publications de la "Nouvelle-droite" le tabou sur les thèses et l’œuvre de Jean THIRIART, en publiant dans la revue bruxelloise "VOULOIR" une étude sur le concept de "parti révolutionnaire historique" et les thèses communautaristes défendues par THIRIART et Luc MICHEL (26).

Dans "LES ENNEMIS DU SYSTEME", Christophe BOURSEILLER précise d'ailleurs quelle est la stratégie du groupe : "PARTISAN EUROPEEN pense que le clivage droite/gauche est dépassé. Il faut maintenant diviser le monde en alliés/ennemis du Système. Les nationalistes-révolutionnaires doivent chercher l'unité d'action avec toutes les composantes du camp anti-système"(27).

A partir de 1989, "LE PARTISAN EUROPEEN" appuie la constitution d'un groupe frère en Belgique, les "GROUPES DE BASE DU BRABANT", issus de la tendance nationale-révolutionnaire du PFN belge (Le "Parti des Forces Nouvelles" belge est l'ultime avatar de la mouvance "REVOLUTION EUROPEENNE"). A cette époque, il n'y a pas d'unité d'action avec le PCN en raison de l'ostracisme dont celui-ci est victime dans les milieux NR et de la Nouvelle-droite.

A partir de 1989, le groupe français abandonne la publication du "PARTISAN EUROPEEN" et les "GROUPES DE BASE DU BRABANT" reprennent le flambeau en éditant une vingtaine de numéros d'une feuille de propagande sous le nom de "PARTISAN".

Au début des années 90, l'unité de structure et d'action sera réalisée entre ce groupe et le PCN. "En 1992, le "PARTISAN EUROPEEN" et les "GROUPES DE BASE DU BRABANT" décident de s'intégrer définitivement au PCN formant ainsi l'unité du nationalisme-révolutionnaire de tendance pro-communiste. le national-communisme professé par THIRIART se retrouve aujourd'hui inscrit en une seule et unique structure, le Parti Communautaire National-européen, qui depuis Bruxelles établis ses réseaux via la France, la Hongrie, les Pays-Bas,..." précise Philippe HERTENS dans son étude sur "LE NATIONALISME RADICAL EN FRANCE"(28). Certes les "GROUPES DE BASE DU BRABANT" n'ont jamais réuni qu'une poignée de militants, mais leur ralliement au PCN est néanmoins fort symbolique, celle de l'unité. C'est en effet l'héritage du "PARTISAN EUROPEEN" qui s'unit ainsi au PCN dans une structure unitaire.

Bien que ne publiant plus sa revue, l'équipe française du "PARTISAN EUROPEEN" ne va pas moins continuer un important travail politique, notamment de recherche idéologique.

LES CLUBS ET LA REVUE

"NATIONALISME ET REPUBLIQUE"

A partir de juin 1990, est publiée une revue largement diffusée en kiosques, "NATIONALISME ET REPUBLIQUE". Son directeur est Michel SCHNEIDER, l'ancien directeur des "CAHIERS DU CDPU" que nous avons déjà évoqué. Cette revue, qui vise à détacher le courant national-révolutionnaire et national-populaire présent au sein du "FRONT NATIONAL" de celui-ci et qui critique violemment les tendances réactionnaires du Lepénisme, manifeste également une ligne anti-américaine, anti-impérialiste et anti-sioniste importante. Ses principaux animateurs, outre Michel SCHNEIDER, sont Yves BATAILLE et Thierry MUDRY, qui influencent la ligne éditoriale de la nouvelle revue et expriment une sensibilité nationaliste-révolutionnaire et communautariste importante.

L'influence du Communautarisme se fera directement sentir dans les trois derniers numéros parus de la revue (6, 7 et 8), puisque Jean THIRIART s'y exprimera directement et que la large diffusion de la revue relancera la diffusion des idées communautaristes en France (29). Luc MICHEL lui-même réalisera la maquette de la couverture du dernier numéro publié.

"NATIONALISME ET REPUBLIQUE" achèvera sa publication en 1992, son action étant trop exclusivement centrée sur la frange nationale-révolutionnaire du "FRONT NATIONAL", étant dans une impasse politique et en proie à de graves difficultés financières. Auparavant, en août 1992, SCHNEIDER aura conduit avec Jean THIRIART une délégation communautariste et nationale-révolutionnaire à Moscou, où elle devait rencontrer les principaux dirigeants de la mouvance nationale-patriotique dont Guenadi ZIOUGANOV, le leader du PCFR, et influencer largement doctrinalement la nouvelle opposition radicale russe (30).

L'INFLUENCE DU COMMUNAUTARISME SUR LA "NOUVELLE DROITE"

Nous avons déjà vu que l'influence des idées communautaristes avait été très réelle au sein du courant constitué par "EUROPE-ACTION" et la "Fédération des Etudiants Nationalistes". En juillet 1962, Dominique VENNER devait publier à Paris une brochure intitulée "POUR UNE CRITIQUE POSITIVE", dans laquelle il exposait notamment que le mouvement nationaliste français devait s'organiser selon de méthodes léninistes. L'ouvrage de VENNER va devenir à partir de 1963 la référence majeure du courant national-révolutionnaire non communautariste en France. Dans cet opuscule, on retrouvait l'influence non avouée des thèses communautaristes de Jean THIRIART. Il faudra attendre 1994 pour que Pierre André TAGUIEF dans son ouvrage "SUR LA NOUVELLE DROITE", rende enfin justice à Jean THIRIART. A ce sujet, il y écrit qu'"il est vrai que les analyses critiques de Jean THIRIART, théoricien de la "Nation européenne" - ou, plus précisément du "national-communautarisme européen" - allaient dans le même sens dès l'automne de 1962"(31).

A l'époque cependant le courant de Dominique VENNER ne tirait pas toutes les options stratégiques et politiques des orientations thiriartiennes. Au moment où l'organisation "JEUNE-EUROPE" s'engageait résolument dans le combat anti-impérialiste contre les Américains, l'organisation de Dominique VENNER, elle, saluait "le courage des Marines" et leur "combat pour l'Occident au VietNam" et ailleurs, prônant un empire blanc "allant de Vladivostok à San Francisco" au nom d'un mondialisme à connotations racistes évidentes.

Nous connaissons bien l'évolution de l'organisation regroupée autour de Dominique VENNER. Celle-ci devait, constatant son échec politique, déboucher, à la fin des années 60, sur la constitution de ce qui deviendra les pôles principaux de la "Nouvelle-droite", à savoir le GRECE et la revue "NOUVELLE ECOLE". Dès la fin des années 70, les idées communautaristes vont progressivement avoir droit de cité au sein de la "Nouvelle-droite" sans que celle-ci avoue d'ailleurs leur origine. Ainsi, de 1967 à 1971, est publié le bulletin lyonnais "SOCIALISTE EUROPEEN" dont le fondateur est Pierre VIAL, à l'époque un des animateurs de l'équipe du "GRECE". Dans le numéro 3, on y souhaite une "Europe de Brest à Bucarest" selon la propre formule de THIRIART au milieu des années 60 (32).

A partir du milieu des années 70, le "GRECE" va progressivement se détacher de l'extrême-droite et adopter certaines des positions développées par Jean THIRIART au milieu des années 60. Ainsi la lutte contre l'Occident assimilé à l'empire américain, ainsi même au début des années 80 les positions pro-soviétiques que va développer Alain de BENOIT et qui sont directement issues des "thèses euro-soviétiques" (33) développées par THIRIART et le PCN à la même époque. Dans son étude déjà évoquée, Pierre André TAGUIEF précise l'origine de l'anti-occidentalisme affiché à partir de 1976 par la "Nouvelle-droite" : "Même si elle n'est pas déclarée, l'influence exercée sur ce point par la pensée de Jean THIRIART nous parait plus que probable; THIRIART a été, dans les années 60, le critique le plus radical et le plus cohérent de "l'Occident mercantiliste", celui des "américanolâtres", ou du "règne de l'argent", incarné par la "Carthage moderne"."(34) Et il rappelle la publication en 1966 de l'article de THIRIART "Une imposture nommée Occident" dans le numéro 3 de la "LA NATION EUROPEENNE", la première attaque radicale et construite contre l'Occident américanisé(35).

En 1985, Guillaume FAYE, alors un des principaux théoriciens de la "Nouvelle-droite", reconnaîtra d'ailleurs le tribut que celle-ci doit au père du Communautarisme européen. Il écrira : "THIRIART est sans doute le plus remarquable théoricien politique de notre époque"(36).

L'IMPACT DES THESES COMMUNAUTARISTES AU SEIN DE LA MOUVANCE NATIONALE-REVOLUTIONNAIRE FRANCAISE

Avec la naissance de la seconde génération du Communautarisme national-européen, les thèses communautaristes vont immanquablement influencer la mouvance nationale-révolutionnaire française. La diffusion des publications du PCN, dont "CONSCIENCE EUROPEENNE", en France y contribuant largement.

La réaction sera, comme au début des années 60, l'ostracisme, la jalousie, et les basses manœuvres. A partir de 1985, la revue est d'ailleurs interdite de diffusion à la "Librairie française" liée alors au "Mouvement Nationaliste-Révolutionnaire", le MNR.

Néanmoins, les idées continuent à passer et à s'imposer, de façon diffuse, comme en témoigne les références à la "Nation Europe", au sein des formations liées au "Groupe du 12 mars" qui regroupe notamment "TROISIEME VOIE" (issue en France du MNR), les "BASES AUTONOMES" espagnoles, les restes du "Parti des Forces Nouvelles " (maintenu à Strasbourg) et le PFN belge. Le "GROUPE DU 12 MARS" publiera notamment un "MANIFESTE A LA NATION EUROPE" largement inspiré de celui publié par Luc MICHEL en 1982. Au sein du PFN belge, il est à noter qu'un courant pro-communautariste va se constituer, qui débouchera sur la publication d'une longue interview de Jean THIRIART dans le n° 78 de "FORCES NOUVELLES" en 1990 (37). Lorsque ce mouvement éclatera, son aile droitière rejoindra le "FRONT NATIONAL" belge, l'aile nationale-révolutionnaire s'alliera au PCN et présentera avec lui lors des élections législatives belges de novembre 1991,à Bruxelles et dans le Brabant wallon, des listes "PCN-PFN" dans le but de prendre des voix au "FRONT NATIONAL" belge ultra-réactionnaire et ultra-libéral et de casser son développement, les derniers militants de cette tendance finissant par rejoindre les rangs du PCN (38).

Après une diffusion quasi clandestine, les thèses communautaristes et la pensée de Jean THIRIART vont réapparaître de façon quasi officielle au sein du mouvement "TROISIEME VOIE", héritier du MNR. Une fraction qui se qualifie de "tercériste radicale" va en effet s'y développer, publiant une revue sous le titre d'"ALTERNATIVE TERCERISTE" qui fera abondamment référence au PCN et à l’œuvre de THIRIART. A l'été 1991, le mouvement "TROISIEME VOIE" éclate. Son aile réactionnaire se place dans l'orbite du "FRONT NATIONAL" de Jean-Marie LE PEN à la suite de son leader Jean Gilles MALLIARAKIS et fournissant notamment les cadres du "RENOUVEAU ETUDIANT" lepéniste. La tendance radicale et anti-FN influencée par le Communautarisme créa le mouvement "NOUVELLE RESISTANCE".

Celui-ci, très prometteur à ses débuts, va malheureusement se diriger dans une impasse politique, largement due à la personnalité plus que douteuse d'un de ses animateurs Christian BOUCHET, dont l'activité apparente relève alors comme maintenant plus de multiples provocations politiques et d'un bluff permanent à l'usage des media que de positions politiques sérieuses et solides. A cela s'ajoute un manque de crédibilité qui tient aux liens tissés par BOUCHET avec diverses sociétés secrètes plus ou plus satanisantes.

Philippe HERTENS précise le côté sombre de "NOUVELLE RESISTANCE" avant qu'elle n'exclue Bouchet en 1996 : "NOUVELLE RESISTANCE par l'intermédiaire de son chef, Christian BOUCHET, prônait une liaison très serrée avec des sociétés très secrètes sataniques. Une évolution du nationalisme qui s'oriente peu à peu vers des activités occultes et qui ont incité beaucoup de membres de "NOUVELLE RESISTANCE" à se détourner du mouvement. On notera l'excellent dossier sur ces aspects du nationalisme dirigé par Serge FAUBERT pour "L'EVENEMENT DU JEUDI" du 4 novembre 93, ayant pour titre : "DERRIERE LA MAGIE ET L'IRRATIONNEL... L'EXTREME-DROITE ET L'AFFAIRISME, LE VRAI VISAGE DES SOCIETES SECRETES". Derrière "NOUVELLE RESISTANCE" se tiendraient cachées des organisations telles que les "EDITIONS DU CHAOS", le "GROUPE DE THEBES", l'"ORDO TEMPLIS ORIENTALIS"... des structures où les notions philosophiques sont rattachées aux écrits du célèbre mage Aleister CROWLEY, la "grande bête" de la magie noire...". Serge HUTIN, historien de l'ésotérisme, dit de CROWLEY, dans un numéro de la revue "HISTORIA" (hors série n°35, 1974), "... qu'il lui arrivait d'organiser des festins orgiaques où les hommes et les femmes mêlaient le sexe et les incantations à Lucifer." le Ministre de la Justice britannique, en 1947, voyait en CROWLEY : "Le personnage le plus pervers et le plus immonde des Royaume-Uni". il est quand même étonnant qu'aujourd'hui, en 1994, un mouvement d'extrême-droite comme "NOUVELLE RESISTANCE" se réfère à un tel personnage"(39).

Ajoutons que l'"EVENEMENT DU JEUDI" évoqué par Philippe HERTENS mettait également en lumière les liens étroits entre BOUCHET et le "Grand Orient de France", institution maçonnique dont on connaît les liens et l'influence au sein du Régime.

Tout cela explique qu'aucune collaboration durable n'a pu s'établir entre "NOUVELLE RESISTANCE" et le PCN avant l'exclusion de Bouchet en 1996. Pourtant celles-ci avaient connu des débuts prometteurs : à la suite du décès de Jean THIRIART en novembre 1992, de nombreux cadres nationaux-révolutionnaires et communautaristes exprimèrent leur désir de voir se reconstituer une organisation européenne. Le PCN s'attela à cette tâche. Il rejoignit le "FRONT EUROPEEN DE LIBERATION", le FEL mis sur pieds par divers groupes nationaux-révolutionnaires, et tenta d'orienter celui-ci vers des positions communautaristes strictement orthodoxes. Avant une dernière tentative au printemps 1993, Luc MICHEL devait d'ailleurs publier une brochure sous le titre "OU VA L'OPPOSITION EUROPEENNE ?(40)" où il développait les grands axes d'unification visant à la reconstitution d'une organisation ayant le poids politique de "JEUNE-EUROPE". A l'été 1993, pourtant, la rupture était évidente(41). Les responsables français et italiens du FEL ne souhaitaient pas déboucher sur une organisation structurée et unitaire et les nombreux aspects douteux de Christian BOUCHET ne permettaient plus une collaboration durable. La rupture est brutale, BOUCHET se lançant depuis dans une campagne de rumeurs, de fausses informations et de diffamation à l'encontre du PCN et de ses dirigeants.

Malheureusement, pour lui l'essor pris par le PCN, son poids politique conséquent (en 1996-97, le PCN a même une représentation parlementaire), la diffusion de la revue "NATION EUROPE" en kiosques en France, ont réduit à néant ces basses manœuvres. La direction du PCN continue d'ailleurs à avoir entre 1993 et 1997 des contacts réguliers avec de nombreux militants et groupes de base de "NOUVELLE RESISTANCE" qui souhaitaient donner une toute autre orientation à leur mouvement.

Fin juillet 1996, "NOUVELLE RESISTANCE", à bout de souffle, implose, les démissions se succédant. La cause principale en est la révélation des liens tissés par BOUCHET avec le "FRONT NATIONAL", mais aussi la mouvance nazi-skin et le monde des sectes satanistes (42). La dérive fascisante et négationniste de la presse de BOUCHET à partir de 1995 traduit cette trahison des idéaux nationaux-révolutionnaires...

1993 : L'IMPLANTATION DU P.C.N. FRANCE

En juin 1993, il est clair pour la direction du PCN que les velléités de constituer une organisation communautariste unifiée ne trouveront pas de concrétisations et que la plupart des participants envisagés n'ont ni la volonté politique ni la capacité matérielle, financière et humaine ni surtout la qualité pour déboucher sur une telle organisation. Le PCN qui depuis sa fondation, en 1984, a une réelle volonté de structuration au niveau européen en tire donc les conséquences qui s'imposent et décide de lancer sa propre structure en France.

En juillet 1993, sont publiés au "JOURNAL OFFICIEL" les statuts d'une Association-Loi de 1901 qui organise en France la structure légale du "Parti Communautaire National-européen", comme section régionale du Parti unitaire transnational européen. Celle-ci voit le jour essentiellement à Paris autour d'une équipe constituée d'anciens militants parisiens du PCN des années 80, dont Jean-Pierre VANDERSMISSEN qui en devient le responsable administratif, et de militants issus de "NOUVELLE RESISTANCE" comme Jacques BOUSSABOUA, ancien militant maoïste de L'HUMANITE ROUGE, qui en devient rapidement le premier Secrétaire-régional pour Paris/Ile-de-France. Lorsque parait en 1994 le premier numéro de "NATION EUROPE", la nouvelle revue du PCN, celui-ci a immédiatement une édition française éditée à Paris et diffusée en kiosques par les NMPP, celle-ci contribuant à faire connaître les idées du parti en France, où elle compte de nombreux abonnés, et où le PCN commence à recruter des adhérents directs hors Paris.

La tâche que s'est donnée la section régionale du parti en France impose de ne pas brûler d'étapes. Il s'agit d'effectuer d'abord un travail de diffusion des idées et de clarification idéologique, comme nous l'avons fait en Belgique.

Le PCN n'en néglige pas pour autant le combat politique sur le terrain. En Belgique, il a manifesté dès ses débuts en 1984 une volonté d'exister sur le terrain parlementaire et de participer aux élections, seule possibilité pour un mouvement révolutionnaire de durer dans une période calme. Le PCN a donc présenté, en mars 1996, une première candidature aux élections cantonales partielles de Clichy-La-Garenne, où Jacques BOUSSABOUA a été le premier candidat national-révolutionnaire et national-bolchevique indépendant de l'extrême-droite à se présenter aux élections depuis cinq décennies. la portée de ce geste étant d'ailleurs hautement symbolique. Comme au début des années 60, le Communautarisme rencontre en France les mêmes difficultés que la génération précédente : le silence des média ( il est significatif que l'on ne parle jamais de "NATION EUROPE", parce qu'elle est la seule revue de qualité matérielle et intellectuelle présente en France dans notre mouvance), ostracisme des concurrents, campagnes de diffamation de nombreux agents provocateurs...

Pourtant, la situation est fort différente de celle des Années 60. Tout d'abord, la Centrale du parti en Belgique est stable, le PCN existe depuis 1984, il se développe régulièrement et a un poids politique certain. Deuxièmement, les idées communautaristes, contrairement au début des années 60, ont été largement diffusées. Jean THIRIART est devenu une référence sérieuse pour de nombreux militants dans l'ensemble de la mouvance Nationale-révolutionnaire.

1996 : "NOUVELLE RESISTANCE"

FUSIONNE AVEC LE PCN

En juillet 1996, "Nouvelle Résistance" est secouée par une première crise qui voit la sortie du Mouvement de son " Aile progressiste " au Congrès d’Alençon. En septembre 1996, la majorité des membres du Bureau de NR décide d’exclure un quarteron de membre, dont Bouchet pour collaboration avec le "Front National". L'exclusion de Bouchet lève toutes les hypothèques qui empêchaient le rapprochement avec le PCN.

Le Mouvement décide donc de fusionner avec le réseau français du Parti Communautaire National-européen (PCN), dans lequel la plupart des Groupes de Bases et Fédérations de NR se sont intégrés. L’immense majorité des membres "NR" approuve ce choix, qui implique une stratégie offensive contre l’extrême-droite en Europe comme en France.

L’Association-loi de 1901 "Nouvelle Résistance", qui poursuit ses activités, devient organisation adhérente du "Front Noir-Rouge-Vert" du PCN, à l'instar d'autres structures issues de NR, comme le "Comité National Anti-Mac Donald’s" et le bulletin "Néfast’Food".

1996 : LE PCN PREND LA DIRECTION IDEOLOGIQUE

DU "FRONT EUROPEEN DE LIBERATION"

Le "Front Européen de Libération" a été fondé comme structure informelle de coordination des mouvements nationaux-bolchéviques européens en 1991. En 1993, il dote sa direction internationale, située en France, d'une structure légale internationalement reconnue (Association-Loi de 1901), de statuts et d’un exécutif statutaire.

Entre 1993 et 1996, comme nous l'avons déjà exposé, le FEL a été secoué par une crise interne, qui a vu s'opposer d'une part une ligne opportuniste, d'autre part une ligne nationale-bolchévique radicale qui suivait la ligne idéologique du PCN (le départ de celui-ci du FEL en octobre 1993 ayant provoqué une cassure interne qui ira sans cesse en s'élargissant).

En septembre 1996, le Bureau exécutif statutaire du FEL, unanime, se ralliait au PCN. Cette nouvelle ligne de marche devait conduire à une réorganisation des activités du FEL, celui-ci s'organisant en structure de contact pour des adhérents directs, des associations ou des publications, à l'exclusion de formations politiques, ceci afin de ne pas faire concurrence ou double emploi avec la structure européenne du PCN.

Toujours fin 1996, le "Front Européen de Libération" devenait organisation adhérente du "Front Noir-Rouge-Vert" du PCN. Alors que de nombreux adhérents européens et les sections française et suisses se ralliaient à la nouvelle ligne de marche, plusieurs des groupes politiques qui avaient constitué le FEL reprenaient alors leur liberté (43).

LE PCN : LA SEULE ALTERNATIVE

POUR LES MILITANTS NR ET

NATIONAUX-BOLCHEVIQUES DE FRANCE

Le sérieux de l'organisation du PCN, sa structuration, son orthodoxie doctrinale, conduiront régulièrement les meilleurs éléments du Nationalisme-révolutionnaire français à le rejoindre. Le PCN est en effet la seule alternative qui se présente à eux.

Le choix pour tout militant national-révolutionnaire en France depuis vingt ans est simple : soit se fondre dans la nauséabonde mouvance réactionnaire regroupée autour des LE PEN et autre MEGRET, où vont se perdre générations après générations les cadres et les militants nationaux-révolutionnaires, "harkis" de la politique, ou construire avec le PCN le Parti de l'Europe et de la Justice sociale, qui libérera et unifiera notre grande patrie continentale.

Luc MICHEL

(septembre 2001)

NOTES

(1) Jean THIRIART, "Chroniques de la nation européenne", in "EUROPE AFRIQUE", hebdomadaire, Bruxelles, 16 septembre 1960.

(2) Ibid.

(3) Jean THIRIART, "Alger départ de l'Europe. L'armée française dans le sens de l'histoire", in "EUROPE AFRIQUE", hebdomadaire, Bruxelles, 30 septembre 1960.

(4) Jean THIRIART, "Le chef de JEUNE-EUROPE s'adresse aux réseaux France. Algérie française version molle et version dure", in "JEUNE-EUROPE", hebdomadaire, Bruxelles, 24 novembre 1961.

(5) J.R. TOURNOUX, "LA TRAGEDIE DU GENERAL", éd. PLON /PARIS MATCH, Paris, 1967, p. 384-385.

(6) "OAS Mission France 3, l'union fait la force", in "JEUNE EUROPE", hebdomadaire, Bruxelles, 22 décembre 1961.

(7) Jean THIRIART, "106 QUESTIONS SUR L'EUROPE", interview biographique avec le concours du journaliste Bernardo Gil MURGAZA, 2è édition, Ed. Machiavel, Charleroi, 1988.

(8) Jean THIRIART, "La France nation départ de la Révolution européenne", in "JEUNE-EUROPE", hebdomadaire, Bruxelles, 5 octobre 1962.

(9) Yannick SAUVEUR , "Jean THIRIART et le national Communautarisme européen", Mémoire présenté devant l'Institut d'études politiques de l'Université de Paris, 2ème édition, Ed. Machiavel, Charleroi, 1983.

(10) "Jeune-Europe", Hebdomadaire, Bruxelles, N° 161, 13 décembre 1963.

(11) "EUROPE UNIVERSITE", N°1, Paris, juin-juillet 1964

(12) Yannick SAUVEUR, Op.Cit.

(13) Ibid.

(14) Cfr. Luc MICHEL, "De Jeune-Europe aux brigades rouges", in "CONSCIENCE EUROPEENNE", mensuel, n°11, Charleroi, mars 1985.

(15) Cfr. René MONZAT, "Enquête sur la droite extrême", Paris, Le Monde Editions, 1992, p. 209.

(16) "SOCIALISME EUROPEEN", Lyon, n° 14.

(17) Yannick SAUVEUR, "L'Organisation "Lutte du Peuple", un mouvement national-bolchevik ?", conférence de sciences politiques (niveau 2, sous la direction de M. MADELIN), Paris, sans date, p. 11.

(18) "VOLONTE ET ACTION", publication bimensuelle en français, allemand et italien de l'OLP, n°5.

(19) Yannick SAUVEUR, "L'Organisation "Lutte du Peuple"...", op. cit., p. 3.

(20) Sur ce sujet cfr. Luc MICHEL, "De Jeune-Europe aux brigades rouges", op. cit.

(21) Yannick SAUVEUR, "L'Organisation "Lutte du Peuple"..., op. cit., p. 22.

(22) Jean THIRIART, "Interview Exclusive", in "Les cahiers du CDPU", Aix-en-Provence, 1976

(23) René MONZAT, opus cit.

(24) Pour l'historique du PCN : se référer à "LA LONGUE MARCHE DU pcn 1984-1996", in "NATION EUROPE", trimestriel, Paris-Bruxelles, N°4-5, 1996;

et Luc MICHEL, "HISTOIRE DU PCN (1984-1999)", in "LA LETTRE COMMUNAU-TARISTE", n° 219, 1999.

(25) Sur cette époque, cfr. les contributions de Luc MICHEL à l'ouvrage collectif "IN MEMORIAM JEAN THIRIART" (livre d'hommage publié après le décès de Thiriart), Ed. MACHIAVEL , Paris-Bruxelles, 1994.

(26) Thierry MUDRY, "Le Parti historique révolutionnaire", in "VOULOIR", Bruxelles, 1986.

(27) Christophe BOURSEILLER, "Les ennemis du Système, enquête sur les mouvements extrémistes en France", Robert Laffont, Paris, 1989.

(28) Philippe HERTENS, "Le nationalisme radical en France", éd. de Magrie, Paris, 1994, p. 59-61.

(29) Cfr. Jean THIRIART, "Europe, l'Empire du Futur ?", in "NATIONALISME ET REPUBLIQUE", La Roque d'Anthéron, n°8, 1992,

et Jean THIRIART, "L'Europe jusqu'à Vladivostok", in "NATIONALISME ET REPUBLIQUE", La Roque d'Anthéron, n°9, 18 septembre 1992.

(30) Sur l'impact des idées communautaristes en Russie, cfr. "L'EUROPE COMMUNAUTAIRE" (Bulletin de contact du PCN en France), Paris, n°1, janvier 1996.

(31) Pierre André TAGUIEFF, "SUR LA NOUVELLE DROITE", Ed. Descartes et Cie, Paris, 1994.

(32) Cfr à ce sujet René MONZAT, "Enquête sur la droite extrême", op. cit., p. 209-210

(33) Cfr. à ce sujet le RECUEIL DE TEXTES publiés entre 1979 et 1983 :

José CUADRADO COSTA, Luc MICHEL et Jean THIRIART, "TEXTES EURO-SOVIETIQUES", Ed. MACHIAVEL, Charleroi, 1984.

Ce recueil fut édité en langues française, néerlandaise, espagnole, italienne, anglaise et russe.

(34) Pierre André TAGUIEFF, opus cit..

(35) Ibid.

(36) Guillaume FAYE, Pierre FRESON, Robert STEUCKERS, "Petit lexique du partisan européen", Ed. Eurograf, Esneu-lez-Liège, octobre 1985.

(37) Jean THIRIART, "L'Empire européen de Dublin à Vladivostok", in "FORCES NOUVELLES", n° 78, février-mars 1990.

(38) Sur la récupération de l'aile nationale-révolutionnaire du PFN par le PCN et les listes "PCN-PFN", cfr.

Luc MICHEL, "Droit de réponse du PCN", in "COURRIER HEBDOMADAIRE DU CRISP", Bruxelles, supplément au n° 1353, mai 1992.

(39) Philippe HERTENS, opus cit.,

(40) Luc MICHEL, "OU VA L'OPPOSITION EUROPEENNE", n° spécial de la revue "NATION EUROPE", Bruxelles, juillet 1993.

(41) Sur la rupture du PCN avec le FEL, consulter :

"CORRESPONDANCE EUROPEENNE", bulletin de contact édité par le Secrétariat-Général européen du PCN, Bruxelles, n° 2, 1993;

et particulièrement "Les Communautaristes quittent le FEL", communiqué du PCN, qui y est publié.

(42) Cfr. notamment :

José LENZINI, "L'enquête sur la profanation du cimetière de Toulon met au jour des liens avec l'extrême-droite", in "LE MONDE", Paris, 25 juillet 1996;

Serge FAUBERT, "Quand le Front vire au "rouge-brun""; in "L"EVENEMENT DU JEUDI", 18 juillet 1996;

C. BARBIER et R. ROSSO, "Orange : le rapport qui dénonce la censure FN", in "L'EXPRESS", 11 juillet 1996.

(43) Un quarteron d’exclus en 1996, dont Bouchet, devaient alors maintenir dans un but de provocation médiatique un "Front" fantôme, qu'ils ont étoffé avec l'adhésion d’un certain nombre de groupuscules néo-nazis. Alors que le "Front Européen de Libération" a été constitué sur une ligne national-bolchévique stricte (que rappelle l’aigle du mouvement anti-hitlérien "Widerstand"), dans la droite ligne du combat anti-nazi des nationaux-bolchéviques des années trente et quarante, ce quarteron d’agents provocateurs défendent des idées néo-nazies qui sont l'opposé même de l'idéal et du combat des fondateurs du FEL. Les statuts du "Front Européen de Libération", publié au Journal officiel de la République française en 1993, qui excluent toute discrimination raciale et visent à "soutenir l’action de l’émancipation européenne", sont là pour le démontrer.

SOURCES NON PUBLIEES

- Fonds d'archives "JEUNE-EUROPE" du pcn

- fonds d'archives "jean thiriart" du pcn

- fonds d'archives "olp" du pcn

- fonds d'archives "cipre" du pcn

- archives privées de luc michel et du pcn